15 février 2016

Les femmes non-conformistes dans le cinéma d'aujourd'hui

DANISH GIRL. FREE LOVE. CAROL.

Cet article part du constat que ce mois-ci, il nous a été proposé grosses productions internationales (américaines surtout), qui parlent d'un amour ou d'une attirance entre 2 femmes. Succès publics et critiques. On peut dire maintenant qu'il y a un vaste public pour le cinéma sur la cause gay. (Et on passera sur la charte graphique des affiches, presque invariable...)
Quand on souhaite la reconnaissance pour les gays, lesbiennes et pour tous ceux qui dépassent les déterminismes liés aux genres et aux mœurs, on peut se réjouir de ces succès. On peut aussi se questionner sur l'opportunité du marché cinématographique (hollywoodien notamment) sur la cause des "LGBT".
Sans compter que dans la même période sont sortis des films comme : Jane Got A Gun, Peur De Rien, La 5ème Vague, le film animé Tout En Haut Du Monde... avec des figures féminines frondeuses, courageuses, anticonformistes, qui luttent contre les règles et le déterminisme social. On peut donc faire ce constat : ces figures féminines sont désormais incontournables dans le cinéma, et il y a un public pour elles...
C'est évidemment le fruit d'un long combat. Durant près d'un siècle il y a eu quelques personnes, courageuses et passionnées, qui ont fabriqué des films hors-norme, sexués, en colère, tragiques, libertaires, fous, marginaux, avec des femmes dans toutes sortes de rôles (autres que la bonne épouse, la bimbo ou l'hytérique). Des films féministes, des films sur les régimes patriarcaux, des films US qui faisaient la nique à l'american way of life sexiste, des films où les femmes tuaient leurs violeurs, des films où elles désiraient, luttaient, bâtissaient ou fuyaient... Des films qui montraient le monde vu par les yeux de femmes. Il y a eu aussi des films de genre sans aucun propos féministe mais réalisés par des femmes : films noirs, de guerre ou d'action, etc. Des films qui ont marqué leurs temps, auprès d'un public large ou très restreint...

La cause des femmes, et notamment des lesbiennes, a d'abord été acquise parmi les populations des grandes villes d'Occident — qui ont élu des maires dont l'homosexualité ne posait pas problème. L'art et le cinéma militant ont essaimé avant tout dans ces mégalopoles culturelles occidentales, pionnières pour la liberté des moeurs. Il ne s'agissait pas tant du besoin d'émancipation sociale (ces villes concentrent une grande part de la petite ou grande bourgeoisie) qu'un combat pour valoriser des minorités (ou des groupes perçus comme des minorités).
C'est ce qui permet un nouveau genre cinématographique, que les grandes productions exploitent depuis des années maintenant : le "biopic sur un personnage luttant pour la reconnaissance d'une minorité". Ainsi de Harvey Milk (Van Sant, 2008), Dallas Buyers Club (Vallée, 2013), Pride (Warchus, 2014), Invictus (Eastwood, 2009), Selma (DuVernay 2014), Mandela (Chadwick, 2013), Malcolm X (Spike Lee 1992), The Lady (Besson 2011), Fleur du désert (Hormann 2009), L'affaire Josey Ames (Caro, 2006), Gandhi, Frida, parmi les plus éclatants succès.
A tel point que les maisons de production peuvent viser un public acquis avec de tels films, avec autant de succès qu'avec des films de super-héros. En 2016, au cinéma, le thème des "femmes qui défient les règles" est devenu un argument vendeur.
Très bien. Sauf que le nombre de films sur un même thème, sortis ce mois-ci, nous questionne, tant cela révèle qu'ils sont politiquement acceptables... c'en est presque embarrassant ! car si les biopics ou les films "inspirés d'une histoire vraie" nous informent sur quelques personnages emblématiques de l'histoire, ils deviennent de moins en moins indispensables à mesure qu'ils constituent de plus en plus un marché. Autrement dit, produire de tels films aujourd'hui dans les pays occidentaux n'est pas forcément courageux, mais on peut les retenir comme de bons outils pédagogiques, des films pouvant accompagner les hommages et les commémorations.
Ces films ont pour vertu de rendre plus mémorable certains destins, et de nous rappeler quel chemin nous avons parcouru. Le chemin nécessaire pour en arriver à faire, aujourd'hui, des films qui ont du succès en parlant de ces femmes hors-normes.
On espère seulement le jour où ces films seront inutiles, où que ce soit dans le monde.

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