15 octobre 2012

Le goulag / le blues des patrons

Entreprise, c'est le trimestriel des requins ; c'est "l'outil indispensable pour les dirigeants et décideurs", comme le présente l'éditeur, qui "traite de façon pragmatique des difficultés que rencontrent les dirigeants".

En voyant la Une du nouveau numéro d'Entreprise, on peut imaginer le blues des patrons — à chanter avec le ton désespéré du pauvre misérable nécessiteux :

...woke up this mornin'
my wife was sick with champagne and coke
went to my factory
the police told me to pay my taxes
went to my workshop
my starvin' workers talk 'bout strike
now mr. Holland says "don't go to Switzerland"
so
Whooo-hooo, I sing the big boss' blues.

15 septembre 2012

Steven Seagal vs Alzheimer.

C'est dommage, Steven. La production a fait réaliser une affiche pour chacun de tes films, alors qu'une seule maquette aurait suffi pour l'ensemble de ta carrière !


Et peut-être aussi que pour tous tes films, un seul scenario aurait suffi. Pense-y pour le prochain !

8 septembre 2012

le grand artiste Ben : "je vous chie à la raie"

Qu'est-ce qui permet de dire d'une oeuvre que c'est de l'art ? parfois, c'est pas facile, pas facile, d'autant que des mouvements de pensée du XXème siècle ont balayé les idées et ont brouillé les cartes. Du coup, il arrive couramment qu'on fasse passer de l'art pour du simple savoir-faire, et du divertissement pour de l'art, des artistes pionniers ou marginaux pour des casse-couilles, et des bonimenteurs à sensations pour des artistes !

Certains artistes n'ont pas eu trop de scrupules à usurper le titre d'artiste quand ils n'ont fait que mettre en forme les désirs d'un public, faire du buzz, un peu comme ces bons maquettistes ou ces bons dessinateurs qui bossent dans la pub : ils sentent l'air du temps, flattent la masse, se mettent au frais, et ils prospèrent.

Tout ça pour dire quoi ? Tout ça pour parler de "Ben", Benjamin Vautier, quoi.
"Ben", ce gros jovial qui connaissait plein de monde dans le milieu arty des années 60 et qui a été aux débuts du mouvements Fluxus ; cet artiste, euh, cet opportuniste qui accumule des objets de consommation courante pour en faire des installations trop stylées.

5 septembre 2012

La doxa du PS (2) - Mitterrand ou les mutations du socialisme français.


* * *  Ce texte explique comment le PS des années 1980, à défaut de se confronter aux enjeux politiques de son temps, s'est forgé une stratégie de communication.
Suite de la 1ère partie : "le pouvoir face à l'immigration"

 

A la fin des années 70, la droite, qui monopolisait la vie politique, était de plus en plus contestée : le chômage augmentait et la dette pointait son nez ; la politique culturelle flanchait dans sa mission de faire « rayonner » la France et de démocratiser les savoirs ; la censure morale menée par les pouvoirs publics était mal vécue par des gens en pleine libération des mœurs, avides de nouvelles formes d’expressions et de sociétés. De plus, l’immigration commençait à poser de nombreuses questions, auxquelles les pouvoirs publics ne donnaient aucune réponse significative.
Pour les mouvements de gauche, il y avait tant de choses verrouillées, tant de mesures rétrogrades, tant d’exclusion à dénoncer ! Pour l’opposition socialiste, dans son rôle de contre-pouvoir, il fallait trouver une vraie légitimité comme contre-pouvoir : il y avait tant à faire, à bousculer... rhâa, c’était bandant, c'était énorme ! 

21 juillet 2012

La doxa du PS (1) - les années 1980 : les nouveaux enjeux du pouvoir.

Les années Mitterrand ont ouvert la voie, non seulement à une politique dite socialiste, mais à un ensemble de proclamations, de vertus, de concepts : une doctrine. Pas une façon de penser, mais au contraire, une façon de ne pas penser : une façon de se comporter. 
La doctrine social-démocrate — la "doxa PS" —, fut la construction d'un ensemble de codes de discours et de comportement. Depuis, elle a pénétré toutes les catégories de population, tous les cercles de la société française. Journalisme, art, enseignement, administration, milieu associatif ; communication, modes de consommation, travail. Comment en est-on arrivé là ?

Les années Mitterrand, au tout début, c'est de nouvelles mesures sociales, davantage de congés payés et l’abaissement de l’âge de la retraite, la loi décisive de décentralisation, les grandes banques nationalisées, l’ISF, la dépénalisation de l’homosexualité, le remboursement de l’IVG par la sécu, les radios privées libres, le livre à prix fixe et la fin de la peine de mort (étrangement, c’est cette abolition qui reste dans les esprits comme symbole de l’ère socialiste).

Les années Mitterrand, c’est aussi le soutien (tardif) à la Marche pour l'égalité et contre le racisme (la marche des Beurs) de 1983, SOS racisme, le goût du métissage, l’invention de concepts tels que les cultures plurielles et la diversité, c'est une certaine volonté d’accepter l'immigration...
Mais c’est aussi les idées de l’extrême-droite pénétrant l’opinion, le rôle grandissant du FN, les « lois Pasqua »… C’est Madelin, Longuet, Devedjian, Pasqua, ex militants du GUD (Groupe Union Défense) ou du mouvement Occident, présents dans un gouvernement de cohabitation PS-RPR. C'est de nombreuses bavures policières dont les coupables étaient trop souvent protégés. C'est des quartiers d'immigrés qui vieillissent et s'enclavent. C'est la méfiance qui s'étend.

Les années Mitterrand, c’est un nouveau clivage politique, qui suivait non plus les intérêts de classes, mais les contours du racisme.

25 mai 2012

Même dans le rock n'roll, il y a des uniformes.

Maintenant que le rock n'roll est devenu démocratique et que sa charge subversive semble dépassée, il faut lui assurer un semblant de subversion... en accord avec les modes et les oripeaux de notre époque.

Pour attirer les jeunes dans les "temples" du rock n'roll, il faut une imagerie qui parle à un public de "fidèles", avec des références "culte" dont les grandes figures semblent des dieux. Or la ferveur religieuse tue la liberté et la subversion.
Le rock n'roll a ses icônes, ses couleurs, son imagerie, ses fétiches, ses paroisses et ses guerres de chapelles, où les puristes disent la messe. Des codes pour souder une communauté (comme d'autres styles musicaux & culturels — chaque genre traîne un gros tas de références communautaires).

L'iconographie rock n'roll rassemble des références issues du rythm n'blues, du rock-steady, du twist, du rock psyché, du garage ou de la surf music, et ces références sont parfois accumulées toutes en même temps.
Mais quels sont les must-have du rock n'roll ?

26 avril 2012

l'Evangile selon Jean au secours des hommes politiques

"La question de l’image pour un homme politique n’est pas une petite affaire. Ici, il ne s’agit pas d’une préoccupation nombriliste, mais bien plus fondamentale, des moyens pour agir. En négligeant mon image, en la considérant comme anecdotique et superficielle, je commettrais une réelle faute politique.
Nicolas Sarkozy, "Libre", livre paru en 2001.

J'y mets la forme, donc il faut me faire confiance. Sarko, et tant d'autres, tirent sans doute les leçons de l'Evangile selon Saint-Jean. Dans les versets 20.30 et 20.31, Jean explique, Jesus c'est un mec super, je vous assure, puisque je vous le dis, vous devez avoir foi en Lui.
"Jésus a fait encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres miracles (…) ces choses ont été écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu."

Croyez, croyez, puisqu'on vous le dit.


17 février 2012

les produits infantilisants pour adultes BIO

Il y a des gens qui choisissent un mode de vie en marge des diktats industriels, évitant les injonctions à consommer et à rejeter des déchets. Chauffage au bois, panneau solaire, chiottes sèches, petit potager ou agriculture du coin, coopératives locales, vêtements reprisés si nécessaire ... tout en admettant certains compromis polluants, parfois inévitables (voiture ou ordinateur). Ces gens choisissent souvent des activités en accord avec des principes d'équité et de partage, évitant celles qui génèrent des luttes de pouvoirs, des conflits et de la misère. Pour ces gens, pas besoin de labels "éthique", "AB" ou "équitable" : en vivant selon leur utopie, ils respectent de fait le monde dans lequel ils vivent.

D'autres n'ont pas choisi ce mode de vie mais ont à coeur de manifester leur bonne volonté. Parce qu'être bio, être éthique, c'est bien, c'est bon. Consommer bio & éthique, c'est tenter de se faire du bien dans son corps tout en affichant les labels de circonstance, labels de vertu qui permettent de montrer à tous qu'on rend le monde meilleur, puisqu'on agitpourlaplanète (du verbe agirpourlaplanète). Ouais, c'est vraiment bien... Quand on croise d'autres membres  de la communauté bio & éthique, on peut même échanger un petit salut de reconnaissance, comme le font les bikers.
vêtement pour femme, vendu sur le site Eco-sapiens.
Mais encore faut-il être reconnaissable, et arborer cette sorte d'uniforme qui atteste de l'appartenance à la communauté. S'habiller de sarouels et d'autres vêtements ethniques en coton bio orange, verts ou violets. Acheter dans les lieux spécialisés, marchés ou supermarchés bio où, en investissant de fortes sommes pour acheter des denrées saines, on garantit l'allègement de la conscience. Rouler en vélo, si possible en méprisant les codes de conduites auxquels doivent se conformer ces gros cons en bagnole. Porter son bébé dans une écharpe dont la pose nécessite un apprentissage de 2 mois et ne lui offrir que des jouets en bois-développement-durable. Tout un ensemble d'attentions quotidiennes qui prouvent qu'on en est...

4 février 2012

L'ÉTAT VOUS AIME, AIMEZ L'ÉTAT !

L'ÉTAT VOUS AIME, AIMEZ L'ÉTAT !

Culture pour chacun pour soi (4) - les politiques publiques par la séduction.

Cet article fait suite (-et-fin) à trois autres textes sur le projet "Culture pour chacun"
(1)- l'évolution de l'action culturelle d'État
(2) - comment on a élaboré la "doctrine"
(3) – l’enterrement.


Il y a un an, le 4 février 2011, Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, célébrait son projet de « Culture pour tous, Culture pour chacun, Culture partagée », lors d’un grand forum à Paris. Les jours suivants, le projet, initié quelques mois mois plus tôt par le rapport « Culture pour chacun », était laissé pour mort. Sur le très coûteux site du ministère, la rubrique Culture partagée fait apparaître les étapes de ce projet : le dernier texte y fut posté le 3 février 2011. RIP.

« Pour chacun », « pour tous », « partagée » ou sans slogan… Quel que soit l’idée que le ministre voulait associer à la culture, le rapport « Culture pour chacun » marquait par sa bêtise et son inaptitude.

Mais comment a-t-on pu pondre un tel rapport, engageant l’Etat et les pouvoirs publics ? Comment la Fonction publique, structure théoriquement neutre et sans enjeux commerciaux, voit-elle certaines de ses structures devenir si viles et si serviles face aux industries et aux actionnaires ?