21 juin 2009

Après la Gay-pride ? LA WJDHMC PRIDE !

La Marche des fiertés une fois par an, ça veut dire quoi ? Qu’on est fier d’être homo ? Il faudrait pour cela qu’être homosexuel soit un progrès, un bienfait ou une vertu. Franchement, bof. En revanche se battre pour conquérir des droits, rendre visible des minorités pour les faire accepter par tout le monde, oui. 
 
La fierté, en tant qu'inversion d'une honte trop longtemps subie, c'est intéressant de la revendiquer. La Gay Pride est un vrai mouvement militant quand elle s'associe pour défendre les droits de toutes les minorités, de genre, d'origine ethnique ou sociale. Elle devient alors un mouvement émancipateur, et ce sont des groupes comme Act-up, en France, qui ont permis cela. Mais le mot « pride » m'ennuie un peu... 
On peut être fier d'AGIR : avec courage, ténacité, intelligence et solidarité… Mais dès qu'un groupe se dit FIER d’être tout simplement ce qu’il est, il ne s'agit plus de revendications mais de chauvinisme ou de condescendance. Ou carrément de mépris des autres. Se dire fier du hasard de sa naissance, c'est le début des dérives identitaires ou communautaires merdiques.

Gaston Kelman écrit, dans son bouquin "je suis noir et je n'aime pas le manioc (2005) :

"Je suis noir et je n'en suis pas fier.
Franchement, je ne vois pas pourquoi je le serais. Tout simplement parce que je ne vois pas de raison à ce qu'on crie sa fierté d'être blanc, jaune, rouge ou noir. Je ne vois pas de raison pour qu'on soit fier d'être noir, et pour le Noir, c'est peut-être même plus que cela.
Je suis noir et j'en suis fier : cette affirmation comme beaucoup d'autres slogans du monde black, nous est venue des USA. James Brown, le talentueux parrain de la soul music a crié un jour : "Say it loud, I am black and proud." ("Dis-le fort : je suis noir et fier de l'être."). Il n'y a rien de plus pathétique pour un peuple que d'être obligé de revendiquer le simple droit à l'existence. Quand un peuple est acculé à crier sa fierté, c'est qu'il ne l'a justement pas encore acquise."
Avoir honte de ce qu'on est est évidemment dévastateur ; il me semble qu'en être fier l'est tout autant. J’ai toujours détesté ce registre-là. La fierté aristocrate valorise son pedigree, ses terres et ses traditions. La fierté musulmane signifie qu'Allah donne à ses fidèles une supériorité sur les mécréants. La fierté d’être une femme implique qu'elle peut être aussi concurrentielle et agressive que les hommes... Mais pire encore, il y a la fierté d’être homme. La fierté noire débouche trop souvent sur la Nation noire et sur l'idée de revanche sur le monde blanc. La fierté juive vient de l'idée d'un peuple élu, qui se targue d'être la conscience du monde » .
Je vomis autant la fierté du bourgeois des capitales, la fierté du terroir, la fierté d'être français, ou algérien, ou riche, ou pauvre, ou cosmopolite, ou manchot ou luthérien.
 

Vous voulez jouer à ça ? Allez. Je suis hétéro. Mais attention je suis aussi juif, de classe moyenne, enfant d'une Arabe et d'un européen de l'est. Et je suis blanc. Je vais créer la White Jewish Diaspora Hetero Middle-Class Pride. On va monter un lobbie, choper des tribunes et manifester une fois par an au nom de la fierté WJDHMC.

Trêve de connerie.
Faisons taire les « fiers ». Notre nombril ne vaut pas plus que celui du voisin. 
Simplement, assumons ce qu'on est, nos forces et nos fragilités, avec humilité et bienveillance. Le reste suivra.